Wura Moraes, danseuse portugo-brésilienne, façonne son travail chorégraphique à travers un parcours transatlantique nourri par une formation à l’Université Angel Vianna (Brésil), à l’École des Sables (Sénégal), à EDIT (Burkina Faso) et au FAICC (Portugal). En tant que performeuse, elle a collaboré avec de nombreux artistes internationaux tels qu’Emmanuelle Huynh, Joana Lopes, Loke Wolf, Gil Mac, Dori Nigro, Charles Cardin-Bourbeau, Calixto Neto, Mónica de Miranda, Vânia Doutel Vaz, le Bod Wilson Trio et Ana Rita Xavier.

Reverberations est la deuxième création du projet plus vaste Confluences, porté par la danseuse et chorégraphe Wura Moraes. À travers ce projet, elle a amorcé une série d’expérimentations artistiques fondées sur sa relation, en tant qu’interprète-créatrice, à la vie et à l’œuvre de son père, Mário Calixto (1960-1996), et de son oncle, Miltércio Santos (1961-2024), tous deux chorégraphes et interprètes.

Cette nouvelle création, Reverberations, prend appui sur une recherche biographique fondée sur les souvenirs de Wura, latents tout au long de son parcours artistique, celui-ci étant intrinsèquement lié aux démarches artistiques de son père et de son oncle. Consciente de l’importance de préserver leur héritage, elle cherche à le revitaliser et à l’activer afin de le rendre accessible à un public plus large.

De nature autobiographique, ce projet interroge la responsabilité de révéler des archives qui échappent aux récits officiels.
Mário Calixto et Miltércio Santos, nés à Bahia (Brésil), ont développé leur propre approche de la danse. Partant de bases autodidactes, ils ont élaboré un langage de plus en plus singulier, marqué par des intersections avec la technique du butô, dans une polyvalence performative résolument contemporaine et intemporelle, nourrie de références à leurs ascendances afro-brésilienne et autochtone, en dialogue avec les paradoxes de leur réalité d’immigrants au Portugal.
À partir de l’expérience vécue lors de la création et de la diffusion de HENDA I XALA – Saudade que fica, premier développement chorégraphique de Confluences, réalisé en coproduction avec le DDD 2024, Wura convoque les liens entre vie, création et mort, le temps spiralé, l’ancestralité, et interroge les notions d’identité, de déplacement et de mémoire, en utilisant le corps comme moyen principal. Elle est animée par le défi de comprendre ce qui est si particulier qu’il en devient commun et nous touche toutes et tous.

Cette nouvelle création, en coproduction avec le Festival DDD 2026, se développera à travers une série de résidences auprès des partenaires du réseau Grand Luxe, avec l’intention d’établir des interlocuteurs tout au long du processus de création, renforçant les interactions et le partage de pratiques artistiques.
Ce travail est porté par la responsabilité de mettre en place des pratiques d’auto-cartographie capables de contourner l’effacement systématique des présences et des pratiques. Il s’inscrit dans une recherche visant à amplifier les récits, contre l’invisibilisation de trajectoires artistiques qui se sont construites sur le territoire européen mais demeurent absentes de l’histoire de la danse au Portugal, avec la conviction profonde que produire des références sauve des vies.

Entretien avec l'artiste :

Pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Wura Moraes, je suis danseuse et chorégraphe luso-brésilienne, et je développe mon travail artistique entre l’Europe, l’Afrique et le Brésil. J’ai été formée au Brésil à la Faculdade Angel Vianna, puis à travers différents contextes de recherche et de transmission, notamment à l’École des Sables au Sénégal, à EDIT au Burkina Faso et à la FAICC au Portugal. En tant qu’interprète, j’ai eu l’opportunité de collaborer avec des artistes aux démarches très diverses, ce qui a profondément nourri mon regard et mon langage chorégraphique. Parallèlement, je développe mon propre travail de création, inscrit dans un projet au long cours intitulé Confluências, à partir duquel j’explore les liens entre mémoire, héritage et création contemporaine, en dialogue avec les archives et les trajectoires artistiques de mon père, Mário Calixto, et de mon oncle, Miltércio Santos, tous deux danseurs et chorégraphes.

Quel projet développez-vous dans le cadre de votre collaboration avec le réseau Grand Luxe ?

Dans le cadre de ma collaboration avec le réseau Grand Luxe, je développe la création Reverberations, qui s’inscrit comme une continuité et un approfondissement du projet Confluências. Ce travail prend appui sur une recherche autobiographique et biographique, à partir de mon histoire familiale et artistique, pour questionner la manière dont les présences et les absences nous traversent et nous constituent. Je m’intéresse particulièrement à la mémoire inscrite dans le corps, au subconscient et à ce qui reste en mouvement malgré l’effacement ou le silence. Reverberations explore les liens entre vie, création et mort, le temps pensé comme spiralé, l’ancestralité et la notion d’archive, tout en interrogeant les questions d’identité, de déplacement et de transmission à travers le corps comme espace de connaissance et de résistance.

Quelles étaient vos attentes pour cette résidence à L’Abri à Genève ?

Pour cette résidence à L’Abri à Genève, j’espérais avant tout disposer de temps, d’espace et de conditions de travail favorables pour approfondir la recherche en studio et intégrer les matériaux que j’avais accumulés lors de précédentes résidences, notamment au sein des réseaux TROIS C-L et Onassis AiR. Je souhaitais pouvoir ralentir le rythme, digérer les informations récoltées et les transformer par le travail corporel. J’espérais également créer des ponts avec le contexte genevois, rencontrer des artistes et des structures locales dont les pratiques pourraient entrer en résonance avec mon travail, et nourrir la création à travers le dialogue, l’observation et l’échange. Ces attentes ont été largement dépassées, tant sur le plan artistique que humain.

Quelles expériences ou impressions marquantes avez-vous vécues à Genève ?

Mon séjour à Genève a été marqué par une grande qualité d’accueil et une richesse exceptionnelle de rencontres et de stimulations artistiques. Dès mon arrivée, j’ai eu la chance d’assister à plusieurs spectacles, ouvertures de studios et ateliers dans le cadre de festivals tels qu’Emergentia et Creative BPM, qui ont nourri ma réflexion et mon imaginaire. Le travail en studio à L’Abri Carouge, dans un espace lumineux et inspirant, a été déterminant pour l’avancée de Reverberations, notamment grâce au regard dramaturgique de Vânia Gala et aux échanges avec d’autres artistes en résidence. Les rencontres informelles, les discussions, l’ouverture de studio en fin de séjour et la découverte de lieux comme le Théâtre de l’Usine ont renforcé mon sentiment d’appartenir à un écosystème artistique vivant, généreux et attentif, et ont ouvert de nouvelles perspectives pour la suite du projet.

Photo (1) Tiago Rodriguez
Photo (2) et (3) Jose Caldeira